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lundi 4 juillet 2011

Au Québec comme au Tchad: l'empowerment plutôt que les médicaments

(Cet article a paru dans l'édition Hiver 2011 de l'Apostolat International)

Le 1er décembre dernier, la vingt-deuxième Journée mondiale de lutte contre le VIH/sida venait nous rappeler le slogan de la Campagne mondiale 2001-2010 de l’Organisation mondiale de la Santé contre le SIDA : Stop SIDA. Tenons notre promesse.

À la même date, en 2005, M. Kofi Annan, alors Secrétaire Général de l’ONU, déclarait qu’il y avait eu d’importants progrès dans la lutte contre le VIH/sida dans presque toutes les régions du monde. Cependant, M. Annan constatait également que le temps était venu de reconnaître que l’action menée n’était pas suffisante pour réaliser l’objectif du Millénaire : avoir stoppé la propagation du VIH/sida d’ici à 2015. «Cette mission est l’affaire de chacun d’entre nous, affirmait M. Annan... stopper la propagation du sida n’est pas un objectif du Millénaire comme les autres, c’est une condition indispensable pour atteindre la plupart des autres objectifs du Millénaire. »

Maintenant, plus qu’à mi-chemin entre cette déclaration et l’année 2015, il est important de maintenir un regard critique, non seulement sur les actions de la communauté internationale, mais aussi sur les actions locales et nationales en matière de prévention et évolution du VIH/sida.

En suivant l’évolution du projet que réalise depuis 2009 le CMO, en partenariat avec l’ACDI, à Pala au Tchad, nous avons constaté que le VIH/sida est une réalité qui affecte de nombreuses personnes des deux sexes, touchant tous les groupes d’âge et tous les niveaux socioéconomiques. C’est le cas pour plusieurs pays en voie de développement, bien que la situation s’améliore graduellement grâce à l’intensification des actions de sensibilisation et de suivi médical. Malgré les différences socio-culturelles, la nouvelle approche québécoise de prévention s'apparente, à celle du programme d’Éducation à la Vie et la l’Amour (EVA), au coeur de notre projet au Tchad.

Au Québec cependant, le VIH/sida est surtout connu sous un autre angle, associé principalement (mais non exclusivement) aux homosexuels et aux toxicomanes. Le discours et l’évolution de la maladie sont donc différents que dans les pays en développement.

Dans son dossier VIH/sida (Décembre 2010), le magazine Fugues qui s'adresse à la communauté gaie de Montréal nous apprend qu’en Amérique du Nord et en Occident, on observe, après un répit, une augmentation des infections dans la population gaie chez les jeunes... et les moins jeunes. Dans un article d’André C. Passiour, le Dr. Réjean Thomas, président de la clinique médicale l’Actuel, affirme que la discrimination envers les homosexuels est problématique. Le même article souligne que, selon les données de l’Actuel des deux dernières années, il y a une baisse du taux d’infection chez les toxicomanes, et une hausse chez les gais de 30 à 34 et de 45 à 54 ans. «Il faut œuvrer à contrer la discrimination, l’homophobie, la stigmatisation, entre autres, qui empêchent encore des hommes gais d’aller se faire dépister », affirme le Dr. Thomas. Dans ce combat, le dépistage est crucial. On estime en effet qu’au Canada et aux États-Unis, environ 25% des personnes séropositives ne savent même pas qu’elles le sont.

Dans un autre article de Fugues, Passiour souligne une autre problématique ayant pu contribuer à cette hausse du taux d’infection: la banalisation du VIH/sida causée par la réussite de la trithérapie. Le VIH/sida est passé de maladie mortelle à maladie chronique. « On a baissé la garde, écrit Passiour, il y a eu une banalisation dans la société générale [au Québec] et dans la communauté gaie en particulier ». Le Dr. André Dontigny, directeur de la Direction du développement des individus et de l’environnement social au ministère de la Santé et des Services sociaux, en témoigne : «Ce fut un gain, on a amélioré la vie des gens, mais cela a entraîné une augmentation des infections ».

Au cours des dernières années au Québec, la prévention a été repensée, visant l’empowerment à travers de nouveaux outils incluant le dépistage et le réseautage. Cette nouvelle approche est mise en valeur dans un autre article de Fugues, signé par Michel Joanny Ffurtin. « Les interventions ne sont donc plus informatives ou médicales, mais visent désormais l’amitié et le cadre social, le suivi médical et les conditions psychologiques, les pratiques sexuelles et la capacité de dire «non», sa conscience personnelle et la connaissance de son statut sérologique», écrit Ffurtin.

Un autre article de Passiour insiste sur l'importance de promouvoir une conscience personnelle, un respect de soi et des autres. Patrick Berthiaume, professionnel au ministère de la Santé et des Services sociaux, explique l’importance de l’amour dans le discours de prévention du VIH/sida. « Faire l’amour implique d’être plus bienveillant envers soi-même et envers l’autre, explique-t-il. Aujourd’hui, il y a une grande part d’anonymat dans la sexualité. Il faut chercher une manière de valoriser la responsabilité envers soi-même et envers les autres, car, en termes de santé publique, cela influe sur la santé sexuelle».

Le parallèle est clair entre l’approche québécoises des dernières années et celle du programme d’Éducation à la Vie et la l’Amour (EVA), au centre des efforts de prévention de notre projet au Tchad. Bien que l’évolution du VIH dans ces deux régions ait suivi un parcours différent, le Québec et le Tchad semblent liés par une approche de prévention holistique axée sur l’autodétermination et la sexualité responsable: enseigner à «aimer», à se respecter soi-même et les autres est une approche qui a des retombées importantes et efficaces.

Quelle que soit la raison de l'adopter, cette approche de prévention nous rappelle que même si la trithérapie permet aux séropositifs de mieux vivre (lorsqu’accessible) il faut éviter la banalisation de VIH qui mine les efforts déjà entrepris. Chaque personne a le devoir de connaître sa sérologie: mieux vaut prévenir que… soigner. Rappelons-nous que le VIH/sida ne se guérit toujours pas!

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